Ce guide a été rédigé par des chercheurs, des juristes et des professionnels de l’Information scientifique et technique afin d’informer de manière simple les chercheurs des nouveaux droits que la loi pour une République numérique d’octobre 2016 leur a ouverts pour la diffusion de leurs écrits publiés dans des revues scientifiques.

Guide d’application de la loi pour une République numérique (art. 30) – Ecrits scientifiques – Version courte

Guide d’application de la loi pour une République numérique

(article30) Écrits scientifiques (version courte)

 

Article 30 de la LOI n° 2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République
numérique

Le chapitre III du titre III du livre V du code de la recherche est
complété par un article L. 533-4 ainsi rédigé :

« Art. L. 533-4.-I.-Lorsqu’un écrit scientifique issu d’une activité de recherche financée au moins pour moitié par des dotations de l’Etat, des collectivités territoriales ou des établissements publics, par des subventions d’agences de financement nationales ou par des fonds de l’Union européenne est publié dans un périodique paraissant au moins une fois par an, son auteur dispose, même après avoir accordé des droits exclusifs à un éditeur, du droit de mettre à disposition gratuitement dans un format ouvert, par voie numérique, sous réserve de l’accord des éventuels coauteurs, la version finale de son manuscrit acceptée pour publication, dès lors que l’éditeur met lui-même celle-ci gratuitement à disposition par voie numérique ou, à défaut, à l’expiration d’un délai courant à compter de la date de la première publication. Ce délai est au maximum de six mois pour une publication dans le domaine des sciences, de la technique et de la médecine et de douze mois dans celui des sciences humaines et sociales.

« La version mise à disposition en application du premier alinéa ne peut faire l’objet d’une exploitation dans le cadre d’une activité d’édition à caractère commercial.

« II.-Dès lors que les données issues d’une activité de recherche financée au moins pour moitié par des dotations de l’Etat, des collectivités territoriales, des établissements publics, des subventions d’agences de financement nationales ou par des fonds de l’Union européenne ne sont pas protégées par un droit spécifique ou une réglementation particulière et qu’elles ont été rendues publiques par le chercheur, l’établissement ou l’organisme de recherche, leur réutilisation est libre.

« III.-L’éditeur d’un écrit scientifique mentionné au I ne peut limiter la réutilisation des données de la recherche rendues publiques dans le cadre de sa publication.

« IV.-Les dispositions du présent article sont d’ordre public et toute clause contraire à celles-ci est réputée non écrite. »

Généralités (Pourquoi, Quand ?)

Rappel général

L’article 30 de la loi pour une République numérique s’inscrit dans le mouvement international pour le libre accès aux publications scientifiques et la circulation des connaissances scientifiques. Il donne de nouveaux droits et de nouvelles libertés au chercheur pour mettre ses écrits en libre accès. Cet article de la loi est applicable à compter de sa publication au journal officiel, soit depuis le 8 octobre 2016 et ne comporte aucun décret d’application.

La loi autorise donc la diffusion ouverte mais ne la rend pas obligatoire. En revanche, les appels à projets européens (notamment dans le cadre de H2020 et des ERC) rendent obligatoire le libre accès aux publications financées et exigent leur dépôt dans une archive
ouverte, à des fins de conservation, quand bien même l’éditeur aurait mis ces publications en accès libre sur son site.

À partir de quand peut-on déposer en ligne ?

Le dépôt de l’écrit scientifique sur une plateforme est toujours possible à n’importe quelle étape de sa rédaction par l’auteur. Par contre, la diffusion sur le web de la version finale du manuscrit auteur acceptée pour publication peut quant à elle être soumise à un délai si l’éditeur le demande. Dans ce cas il est possible d’indiquer une date de diffusion différée sur HAL ou d’autres archives ouvertes.
Ce délai est au maximum :

● de 6 mois pour une publication dans le domaine des sciences, de la technique et de la médecine (STM) ;

● de 12 mois dans celui des sciences humaines et sociales (SHS).

Le délai court à partir de la date de première diffusion en ligne de la publication par l’éditeur, et non de la date de parution du numéro de la revue qui peut être ultérieure.

Si l’éditeur l’autorise, la diffusion peut se faire sans délai ou dans un délai plus court.

Peut-on déposer des publications antérieures au 8 octobre 2016 ?

Considérant que l’esprit de la loi vise à favoriser la communication scientifique, les chercheurs sont encouragés à déposer leurs manuscrits antérieurs au 8 octobre 2016.

Type et contenu des publications (Quoi ?)

Que doit-on entendre par « écrit scientifique publié dans un périodique publié au moins une fois par an ?

L’expression “écrit scientifique” couvre les publications scientifiques de type articles, recensions, communications, compte rendus, interventions, commentaires, rapports, dès lors qu’elles paraissent dans une revue ou un journal scientifique ayant un rythme de parution annuel au minimum.

Quid des articles publiés par un éditeur étranger ?

L’article 30 de la loi précise que les “dispositions du présent article sont d’ordre public et [que] toute clause contraire à celles-ci est réputée non écrite”. Cette affirmation concerne donc également les contrats signés avec des éditeurs étrangers.

Quid des écrits publiés dans une publication/un périodique “grand public” ou une revue professionnelle?

La loi permet la diffusion en open access des “écrits scientifiques”. Les articles publiés dans la presse d’information générale (quotidien ou hebdo national, médias en ligne) ou dans une revue professionnelle ne font pas partie de son périmètre. Toutefois, cette distinction entre article scientifique et article publié dans un journal grand public s’appuyant effectivement sur des travaux de recherche n’est pas forcément évidente, et peut être appréciée de diverses manières. Il appartient donc à l’auteur de juger du caractère scientifique de son écrit.

Que veut dire « version finale acceptée pour publication » ?

Le texte de la loi précise que l’auteur a le droit de déposer en libre accès « la version finale de son manuscrit acceptée pour publication ». Il s’applique donc à la version comportant les révisions intégrées à la suite du processus d’évaluation par un comité de lecture
(peer-reviewing). L’expression « version finale acceptée pour publication » renvoie ainsi à la version validée par l’auteur avant mise en forme de l’éditeur et bon-à-tirer (BAT), qui donne le feu vert à la dernière phase du processus d’édition.

Si l’écrit scientifique est publié dans une revue en accès ouvert, l’auteur peut-il la mettre à disposition sur une plateforme d’archive ouverte ?

Oui. La loi précise que dès lors que l’éditeur met gratuitement la publication à disposition du public, l’auteur peut lui-même mettre sans délai à disposition du public la version finale de son manuscrit acceptée pour publication.

Statut du chercheur (Qui ?)

La loi s’applique pour les auteurs, quel que soit leur statut (chercheur, ingénieur, doctorant,… relevant d’un statut public ou privé) et leur nationalité, d’un écrit scientifique issu d’une activité de recherche financée au moins pour moitié par des dotations de l’État français, des collectivités territoriales ou des établissements publics, par des subventions d’agences de financement nationales ou par des fonds de l’Union européenne. L’évaluation du financement inclut tous les coûts de la recherche (salaires, hébergement …).

Lieu de dépôt (Où ?)

Où déposer ?

La loi prévoit simplement “la mise à disposition gratuitement dans un format ouvert, par voie numérique” sans imposer de lieu de dépôt. Tout lieu de dépôt numérique ouvert est donc possible.

Il est recommandé de choisir un lieu de dépôt assurant la pérennité de l’accès à la publication, tel que HAL (https://hal.archives-ouvertes.fr/) ou l’archive ouverte institutionnelle de l’établissement de l’auteur.

Les sites web personnels ou le site d’un laboratoire sont autorisés mais présentent rarement ces garanties.

Procédure (Comment ?)

Si un contrat a été signé avec l’éditeur : la loi est supérieure au contrat et s’applique sans conditions contractuelles supplémentaires.
En revanche, il est possible de réduire en accord avec l’éditeur la durée d’embargo, pour passer en dessous des seuils légaux (6 mois pour le domaine des STM, 12 mois pour les SHS). Ces derniers fixent une durée maximum.

Attention, l’accord des co-auteurs est une condition nécessaire expressément prévue par la loi.

Peut-on diffuser sous la licence Creative Commons de son choix?

Non : seules certaines licences sont utilisables. L’article 30 précise que les publications diffusées dans le cadre de la loi ne peuvent pas faire l’objet d’une exploitation dans le cadre d’une activité d’édition à caractère commercial. Cela exclut les licences CC suivantes : les licences CC-0, CC-BY et CC-BY-SA. En revanche, les licences qui portent la mention NC (Non commercial) sont autorisées.

Si le contrat signé avec l’éditeur donne plus de droit que ce que permet la loi (en autorisant par exemple la licence CC-BY), ce sont les clauses du contrat qui s’appliquent.

La restriction de la loi porte donc uniquement sur la réutilisation pour une activité d’édition et laisse libres toutes les applications scientifiques ou industrielles, qu’elles soient ou non à caractère commercial.


Dans tous les cas, n’hésitez pas à contacter l’adresse support ou le référent open access de votre établissement qui sauront vous accompagner.

* Le groupe de travail ayant produit ce texte a été initié par le CNRS et l’ADBU en avril 2017 puis intégré au sein de la BSN du MESRI qui publie le guide sur son site. La FAQ rédigée par le GTAO-Couperin http://openaccess.couperin.org/category/faq/ sur le même thème a servi d’inspiration pour ce guide, les deux textes ayant eu des rédacteurs en commun.