Le Sommet mondial sur la société de l'information, dans sa déclaration, a la volonté « d'édifier une société à dimension humaine, inclusive et privilégiant le développement, une société de l'information, dans laquelle chacun ait la possibilité de créer, d'obtenir, d'utiliser et de partager l'information et le savoir et dans laquelle les individus, les communautés et les peuples puissent ainsi réaliser l'intégralité de leur potentiel dans la promotion de leur développement durable et l'amélioration de leur qualité de vie ».

Déclaration de principes du Sommet mondial sur la société de l’information

Construire la société de l’information: un défi mondial pour le nouveau millénaire

A. Notre conception commune de la société de l’information

1. Nous, représentants des peuples du monde, réunis à Genève du 10 au 12 décembre 2003 pour la première phase du Sommet mondial sur la société de l’information, proclamons notre volonté et notre détermination communes d’édifier une société à dimension humaine, inclusive et privilégiant le développement, une société de l’information, dans laquelle chacun ait la possibilité de créer, d’obtenir, d’utiliser et de partager l’information et le savoir et dans laquelle les individus, les communautés et les peuples puissent ainsi réaliser l’intégralité de leur potentiel dans la promotion de leur développement durable et l’amélioration de leur qualité de vie, conformément aux buts et aux principes de la Charte des Nations Unies ainsi qu’en respectant pleinement et en mettant en oeuvre la Déclaration universelle des droits de l’homme.

2. Pour nous, l’enjeu est de tirer parti du potentiel des technologies de l’information et de la communication (TIC) pour promouvoir les objectifs de développement énoncés dans la Déclaration du Millénaire, à savoir l’éradication de l’extrême pauvreté et de la faim, l’éducation primaire pour tous, l’égalité hommes femmes et l’autonomisation des femmes, la lutte contre la mortalité infantile, l’amélioration de la santé maternelle, la lutte contre le VIH/SIDA, le paludisme et d’autres maladies, la durabilité de l’environnement et l’élaboration d’un partenariat mondial pour parvenir à un développement propice à l’instauration d’un monde plus pacifique, plus juste et plus prospère. Nous renouvelons en outre notre engagement de parvenir à un développement durable et d’atteindre les objectifs de développement arrêtés dans la Déclaration de Johannesburg et son plan d’application et dans le consensus de Monterrey, ainsi que dans d’autres documents de Sommets pertinents des Nations Unies.

3. Nous réaffirmons l’universalité, l’indivisibilité, l’interdépendance et la corrélation de tous les droits de l’homme et de toutes les libertés fondamentales, y compris le droit au développement consacré par la Déclaration de Vienne. Nous réaffirmons également que la démocratie, le développement durable et le respect des droits humains et des libertés fondamentales ainsi que la bonne gouvernance à tous les niveaux sont des principes interdépendants qui se renforcent les uns les autres. Nous nous engageons par ailleurs à renforcer le respect de la primauté du droit dans les affaires internationales et nationales.

4. Nous réaffirmons que, fondement essentiel de la société de l’information et conformément aux dispositions de l’Article 19 de la Déclaration universelle des droits de l’homme, tout individu a droit à la liberté d’opinion et d’expression, ce qui implique le droit de ne pas être inquiété pour ses opinions et celui de chercher, de recevoir et de répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit. La communication est un processus social fondamental, un besoin essentiel de l’être humain et la base de toute organisation sociale. Elle est le pivot de la société de l’information. Toute personne, où que ce soit dans le monde, devrait avoir la possibilité de participer à la société de l’information et nul ne devrait être privé des avantages qu’elle offre.

5. Nous réaffirmons aussi notre attachement aux dispositions de l’Article 29 de la Déclaration universelle des droits de l’homme, en particulier que l’individu a des devoirs envers la communauté dans laquelle seul le libre et plein développement de sa personnalité est possible, et que, dans l’exercice de ses droits et dans la jouissance de ses libertés, chacun n’est soumis qu’aux limitations établies par la loi exclusivement en vue d’assurer la reconnaissance et le respect des droits et libertés d’autrui et afin de satisfaire aux justes exigences de la morale, de l’ordre public et du bien-être général dans une société démocratique. Ces droits et libertés ne peuvent en aucun cas être exercés dans un esprit contraire aux buts et principes de l’Organisation des Nations Unies. Ainsi nous encouragerons une société de l’information dans laquelle est respectée la dignité humaine.

6. Fidèles à l’esprit de la présente Déclaration, nous nous réengageons à défendre le principe de l’égalité souveraine de tous les Etats.

7. Nous reconnaissons que la science joue un rôle capital dans le développement de la société de l’information. Bon nombre des éléments constitutifs de la société de l’information sont la conséquence des progrès scientifiques et techniques rendus possibles par la mise en commun des résultats de la recherche.

8. Nous reconnaissons que l’éducation, le savoir, l’information et la communication sont à la base du progrès, de l’esprit d’entreprise et du bien-être de l’être humain. Par ailleurs, les TIC ont une incidence immense sur presque tous les aspects de notre vie. L’évolution rapide de ces technologies crée des occasions complètement nouvelles de parvenir à des niveaux de développement plus élevés. Leur capacité à réduire bon nombre d’obstacles classiques, notamment ceux que constituent le temps et la distance, permet pour la première fois dans l’histoire de faire bénéficier de leur potentiel des millions d’êtres humains dans toutes les régions du monde.

9. Nous sommes conscients que les TIC devraient être considérées comme un moyen, et non comme une fin en soi. Dans des conditions favorables, elles peuvent être un puissant outil, accroissant la productivité, stimulant la croissance économique, favorisant la création d’emplois et l’employabilité et améliorant la qualité de vie de tous. Elles peuvent par ailleurs contribuer au dialogue entre les personnes, les nations et les civilisations.

10. Nous sommes également tout à fait conscients du fait que les bienfaits de la révolution des technologies de l’information sont aujourd’hui inégalement répartis entre les pays développés et les pays en développement, ainsi qu’à l’intérieur des sociétés. Nous sommes pleinement résolus à faire de cette fracture numérique une occasion numérique pour tous, particulièrement pour ceux qui risquent d’être laissés pour compte et d’être davantage marginalisés.

11. Nous sommes résolus à donner corps à notre conception commune de la société de l’information, pour nous mêmes et pour les générations futures. Nous reconnaissons que les jeunes, population active de demain, sont à la pointe de la création et de l’utilisation des TIC. Il faut donc leur donner les moyens d’agir en tant qu’apprenants, développeurs, contributeurs, entrepreneurs et décideurs. Nous devons prêter tout particulièrement attention aux jeunes qui n’ont pas pu encore bénéficier pleinement des possibilités offertes par les TIC. Nous sommes également résolus à créer des conditions propices au développement d’applications et de services TIC tenant compte des droits des enfants ainsi que de leur protection et de leur bien-être.

12. Nous affirmons que le développement des TIC est porteur de multiples opportunités pour les femmes, qui devraient faire partie intégrante de la société de l’information et en être des acteurs clefs. Nous sommes résolus à faire en sorte que la société de l’information favorise l’autonomisation des femmes et leur participation pleine et entière, à égalité avec les hommes, dans toutes les sphères de la société, à tous les processus de prise de décision. Nous devrions favoriser l’égalité entre les hommes et les femmes et, à cette fin, utiliser les TIC comme outil.

13. Dans l’édification de la société de l’information, nous devons prêter une attention particulière aux besoins spécifiques des groupes sociaux marginalisés et vulnérables, y compris les migrants, les personnes déplacées et les réfugiés, les chômeurs et les personnes démunies, les minorités et les populations nomades. Nous devons également prêter attention aux besoins spécifiques des personnes âgées et des handicapés.

14. Nous sommes résolus à donner aux pauvres, tout particulièrement à ceux qui vivent dans des zones isolées ou rurales et dans des zones urbaines marginalisées, les moyens de devenir autonomes, d’accéder à l’information et d’utiliser les TIC comme outil dans les efforts qu’ils déploient pour s’arracher à la pauvreté.

15. Dans l’évolution de la société de l’information, une attention particulière doit être accordée à la situation spéciale des peuples autochtones, ainsi qu’à la préservation de leur héritage et de leur patrimoine culturel.

16. Nous continuons d’accorder une attention
particulière aux besoins spécifiques des populations des pays en développement, des pays à économie en transition, des pays les moins avancés, des petits Etats insulaires en développement, des pays en développement enclavés, des pays pauvres lourdement endettés, des pays et territoires sous occupation, des pays sortant de conflits et des pays et régions ayant des besoins particuliers, ainsi qu’aux situations qui font peser de graves menaces sur le développement, par exemple les catastrophes naturelles.

17. Nous reconnaissons que l’édification d’une société de l’information inclusive exige de nouvelles formes de solidarité, de partenariat et de coopération entre tous les Etats, le secteur privé, la société civile et les organisations internationales. Réalisant que l’objectif ambitieux de la présente Déclaration – réduire la fracture numérique et garantir un développement harmonieux, juste et équitable pour tous – impliquera un ferme engagement de la part de toutes les parties prenantes, nous lançons un appel à la solidarité numérique, aussi bien à l’échelle des nations qu’à l’échelle internationale.

18. Aucun élément de la présente Déclaration ne doit être interprété comme altérant, contredisant, ou limitant les dispositions de la Charte des Nations Unies et de la Déclaration universelle des droits de l’homme, ainsi que de tout autre instrument international ou législation nationale adopté pour promouvoir ces instruments, ni comme constituant une dérogation à ces instruments.

B. Une société de l’information pour tous : principes fondamentaux

19. Nous sommes résolus, dans notre entreprise, à faire en sorte que chacun puisse bénéficier des possibilités que peuvent offrir les TIC. Nous nous accordons à penser que, pour s’acquitter de cette tâche, toutes les parties prenantes devraient travailler ensemble pour améliorer l’accès à l’infrastructure et aux technologies de l’information et de la communication, ainsi qu’à l’information et au savoir, pour renforcer les capacités, accroître la confiance et la sécurité dans l’utilisation des TIC, créer un environnement propice à tous les niveaux, développer et élargir les applications TIC, favoriser et respecter la diversité culturelle, reconnaître le rôle des médias, prendre en compte les dimensions éthiques de la société de l’information et encourager la coopération internationale et régionale. Nous reconnaissons que tels sont les principes fondamentaux de l’édification d’une société de l’information inclusive.

1) Le rôle des gouvernements et de toutes les parties prenantes dans la promotion des TIC pour le développement

20. Les gouvernements, le secteur privé, la société civile, l’Organisation des Nations Unies, ainsi que d’autres organisations internationales sont investis d’une responsabilité et d’un rôle importants dans l’édification de la société de l’information et, selon le cas, dans les processus de prise de décision. L’édification d’une société de l’information à dimension humaine est une entreprise commune qui requiert une coopération et un partenariat entre toutes les parties prenantes.

2) Infrastructure de l’information et de la communication, fondement essentiel d’une société de l’information inclusive

21. La connectivité a un rôle central à jouer dans l’édification de la société de l’information. Un accès universel, ubiquitaire, équitable et financièrement abordable aux infrastructures et aux services TIC, constitue l’un des défis de la société de l’information et devrait être l’un des objectifs de tous ceux qui participent à son édification. La connectivité comprend également l’accès aux services de l’énergie et aux services postaux qui devrait être garanti dans le respect de la législation nationale de chaque pays.

22. La mise en place d’infrastructures et d’applications de réseau d’information et de communication suffisamment développées, adaptées aux conditions régionales, nationales et locales, facilement accessibles et financièrement abordables, et qui utilisent davantage les atouts du large bande et d’autres technologies innovantes, lorsqu’elles existent, peut permettre d’accélérer le progrès social et économique des pays et de favoriser la prospérité de tous les citoyens, de toutes les communautés et de tous les peuples.

23. Des politiques propres à créer, à tous les niveaux, des conditions favorables de stabilité, de prévisibilité et d’équité dans la concurrence devraient être établies et mises en oeuvre d’une manière susceptible, non seulement de mobiliser davantage d’investissements privés pour le développement des infrastructures TIC, mais encore de répondre aux obligations de service public dans les régions où les mécanismes traditionnels du marché ne fonctionnent pas. Dans les zones défavorisées, l’installation de points d’accès public aux TIC dans des endroits tels que bureaux de poste, écoles, bibliothèques et archives peut être un moyen efficace d’assurer l’accès universel à l’infrastructure et aux services de la société de l’information.

3) Accès à l’information et au savoir

24. La capacité de chacun d’accéder à l’information, aux idées et au savoir et d’y contribuer est essentielle dans une société de l’information inclusive.

25. Le partage et le renforcement du savoir mondial pour le développement peuvent être améliorés si l’on supprime les obstacles à l’accès équitable à l’information pour les activités économiques, sociales, politiques, sanitaires, culturelles, éducatives et scientifiques et si l’on facilite l’accès à l’information du domaine public, entre autres au moyen de technologies d’assistance conçues pour être universelles.

26. La croissance de la société de l’information passe par la création d’un domaine public riche, qui serait à l’origine de multiples avantages : éducation du public, création d’emplois, innovation, débouchés économiques et progrès scientifiques. Les informations relevant du domaine public devraient être facilement accessibles de manière à étayer la société de l’information et devraient être protégées contre les utilisations abusives. Il faudrait renforcer les institutions publiques telles que les bibliothèques, les archives, les musées, les collections culturelles et d’autres points d’accès communautaire, de manière à promouvoir la préservation des archives documentaires et un accès libre et équitable à l’information.

27.L’accès à l’information et au savoir peut être encouragé en sensibilisant davantage toutes les parties prenantes aux possibilités qu’offrent les différentes applications logicielles, notamment les logiciels propriétaires, les logiciels à code source ouvert et les logiciels libres, afin d’accroître la concurrence, l’accès des utilisateurs, l’éventail des choix et l’abordabilité, et de développer les solutions qui répondent le mieux à leurs attentes. L’abordabilité des logiciels devrait être considérée comme un élément important d’une société de l’information véritablement inclusive.

28. Nous nous efforçons de promouvoir un accès universel, avec égalité des chances, pour tous, aux connaissances scientifiques, ainsi que la création et la diffusion des informations scientifiques et techniques, dans le cadre, par exemple, d’un accès ouvert dans le domaine des publications scientifiques.

4) Renforcement des capacités

29. Chacun devrait avoir la possibilité d’acquérir les compétences et les connaissances nécessaires pour pouvoir jouer un rôle actif dans la société de l’information et l’économie du savoir, en comprendre le fonctionnement et en tirer pleinement parti. L’alphabétisation et l’enseignement primaire universel sont des facteurs essentiels pour édifier une société de l’information vraiment inclusive, une attention particulière étant accordée aux besoins spécifiques des jeunes filles et des femmes. Etant donné le large éventail de spécialistes des TIC et de l’information requis à tous les niveaux, une attention particulière doit être accordée au renforcement des capacités institutionnelles.

30. L’utilisation des TIC à tous les stades de l’éducation, de la formation et du développement des ressources humaines devrait être encouragée, les besoins particuliers des handicapés et des groupes défavorisés ou vulnérables étant pris en compte.

31. L’éducation permanente et l’éducation des adultes, la reconversion, l’apprentissage tout au long de la vie, l’apprentissage à distance et d’autres services spéciaux, comme la télémédecine, peuvent apporter une contribution essentielle à l’employabilité et aider à tirer parti des nouvelles possibilités qu’offrent les TIC pour les emplois traditionnels, les emplois indépendants et les nouvelles professions. La prise de conscience et la maîtrise des notions de base dans le domaine des TIC sont à cet égard essentielles.

32. Les créateurs, éditeurs et auteurs de contenu ainsi que les enseignants, les formateurs, les archivistes, les bibliothécaires et les apprenants devraient contribuer activement à promouvoir la société de l’information, en particulier dans les pays les moins avancés.

33. Pour parvenir à un développement durable de la société de l’information, il faut accroître les capacités nationales en matière de recherche-développement dans le secteur des TIC. En outre, des partenariats, en particulier entre pays développés et pays en développement, y compris les pays à économie en transition, dans les domaines de la recherche-développement, du transfert de technologies, de la production et de l’utilisation des produits et services TIC sont essentiels pour favoriser le renforcement des capacités et la participation à la société de l’information à l’échelle mondiale. La fabrication de produits TIC ouvre d’importantes perspectives de création de richesses.

34. La concrétisation des aspirations que nous partageons, en particulier pour que les pays en développement et les pays à économie en transition, deviennent membres à part entière de la société de l’information, pour qu’ils puissent véritablement s’intégrer dans l’économie du savoir, dépend largement du renforcement des capacités dans les domaines de l’éducation, de la technologie, du savoir-faire et de l’accès à l’information, lesquels constituent des facteurs majeurs de développement et de compétitivité.

5) Etablir la confiance et la sécurité dans l’utilisation des TIC

35. Renforcer le climat de confiance par des mesures garantissant notamment la sécurité de l’information et la sécurité des réseaux, l’authentification ainsi que la protection de la vie privée et du consommateur est un préalable au développement de la société de l’information et à l’établissement de la confiance parmi les utilisateurs des TIC. Une culture globale de la cybersécurité doit être encouragée, développée et mise en oeuvre en coopération avec tous les partenaires et tous les organismes internationaux compétents. Ces efforts devraient être soutenus par une coopération internationale renforcée. Dans cette culture mondiale de la cybersécurité, il importe d’accroître la sécurité et d’assurer la protection des données et de la vie privée, tout en améliorant l’accès, et les échanges commerciaux. Cette culture mondiale de la cybersécurité doit en outre tenir compte du niveau de développement socio-économique des pays et respecter les aspects de la société de l’information qui sont orientées vers le développement.

36. Tout en reconnaissant les principes d’un accès universel et non discriminatoire aux TIC pour toutes les nations, nous soutenons les activités menées par les Nations Unies pour empêcher que les TIC puissent être utilisées à des fins qui sont incompatibles avec les objectifs du maintien de la stabilité et de la sécurité internationales et risquent de nuire à l’intégrité des infrastructures nationales, au détriment de la sécurité des Etats. Il est nécessaire d’éviter que les ressources et les technologies de l’information soient utilisées à des fins criminelles ou terroristes, tout en respectant les droits de l’homme.

37. Le pollupostage est un problème important et croissant, pour les utilisateurs, les réseaux et l’Internet dans son ensemble. Les questions du pollupostage et de la cybersécurité devraient être traitées aux niveaux national et international appropriés.

6) Créer un environnement propice

38. L’existence d’un environnement propice, aux niveaux national et international, est essentielle pour la société de l’information. Les TIC devraient être utilisées en tant qu’important outil de bonne gouvernance.

39. La primauté du droit, complétée par un cadre politique et réglementaire favorable, transparent, propice à la concurrence, technologiquement neutre et prévisible, reflétant la situation réelle des pays, est fondamentale dans l’édification d’une société de l’information à dimension humaine. Les pouvoirs publics devraient intervenir de façon adéquate pour remédier aux insuffisances du marché, maintenir une concurrence équitable, attirer les investissements, intensifier le développement des infrastructures et des applications TIC, optimiser les avantages économiques et sociaux et servir les priorités nationales.

40. Il est indispensable que les efforts nationaux de développement soient étayés par un environnement international dynamique et propice, favorable aux investissements étrangers directs, au transfert de technologies et à la coopération internationale, particulièrement en ce qui concerne les finances, l’endettement et le commerce, ainsi que par une participation pleine et entière des pays en développement aux décisions qui sont prises au plan mondial. Améliorer la connectivité et la rendre financièrement accessible à l’échelle mondiale contribueraient pour beaucoup à renforcer l’efficacité de ces efforts de développement.

41. Les TIC sont un puissant catalyseur de la croissance, car elles permettent de réaliser des gains d’efficacité et de productivité, en particulier au niveau des petites et moyennes entreprises (PME). A cet égard, le développement de la société de l’information est important pour la croissance de l’ensemble de l’économie dans les pays développés comme dans les pays en développement. Il conviendrait d’encourager les gains de productivité et les innovations rendus possibles par l’utilisation et par l’application des TIC dans tous les secteurs économiques. Une répartition équitable des bénéfices contribue à l’élimination de la pauvreté et au développement social. Les politiques les plus bénéfiques seront vraisemblablement celles qui encouragent les investissements productifs et permettent aux entreprises, notamment aux PME, de procéder aux changements nécessaires pour pouvoir profiter des bienfaits offerts par les TIC.

42. La protection de la propriété intellectuelle est importante pour encourager l’innovation et la créativité dans la société de l’information ; de même, une large dissémination et diffusion ainsi qu’un partage du savoir sont importants pour encourager l’innovation et la créativité. Faciliter la participation effective de tous à la protection de la propriété intellectuelle et au partage du savoir par la sensibilisation et le renforcement des capacités est un élément fondamental d’une société de l’information inclusive.

43. Le meilleur moyen de favoriser un développement durable dans la société de l’information est d’intégrer pleinement les efforts et les programmes en matière de TIC aux stratégies de développement nationales et régionales. Nous nous félicitons du Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD), et nous sommes favorables à ce que la communauté internationale appuie les mesures liées aux TIC prises dans le cadre de cette initiative ainsi que celles qui relèvent d’efforts analogues déployés dans d’autres régions. La répartition des fruits de la croissance alimentée par les TIC contribue à l’éradication de la pauvreté et au développement durable.

44. La normalisation est l’un des éléments constitutifs indispensables de la société de l’information. L’accent devrait être mis tout particulièrement sur l’élaboration et l’adoption de normes internationales. L’élaboration et l’utilisation de normes ouvertes, compatibles, non discriminatoires et axées sur la demande qui tiennent compte des besoins des usagers et des consommateurs constituent un élément capital pour développer et diffuser les TIC et en rendre l’accès plus abordable, en particulier dans les pays en développement. Les normes internationales ont pour objet de créer des conditions permettant au consommateur d’avoir accès aux services, partout dans le monde, et quelle que soit la technologie utilisée.

45. Le spectre des fréquences radioélectriques devrait être géré dans l’intérêt public et conformément au principe de légalité, dans le strict respect des législations et réglementations nationales ainsi que des accords internationaux applicables.

46. Dans l’édification de la société de l’information, les Etats sont vivement encouragés à prendre des mesures pour éviter toute action unilatérale non conforme au droit international et à la Charte des Nations Unies qui pourrait faire obstacle à la pleine réalisation du développement économique et social des populations des pays concernés, ou nuirait à leur bien-être.

47. Etant donné que les TIC modifient peu à peu nos habitudes de travail, il est fondamental de créer des conditions de travail sûres, fiables et salubres, qui soient adaptées à l’utilisation de ces technologies et respectent les normes internationales pertinentes.

48. L’Internet est devenu une ressource publique mondiale et sa gouvernance devrait être un élément essentiel de la société de l’information. La gestion internationale de l’Internet devrait s’exercer de façon multilatérale, transparente et démocratique, avec la pleine participation des Etats, du secteur privé, de la société civile et des organisations internationales. Elle devrait assurer une répartition équitable des ressources, faciliter l’accès de tous et garantir le fonctionnement stable et sécurisé de l’Internet, dans le respect du multilinguisme.

49. La gestion de l’Internet recouvre aussi bien des questions techniques que des questions de politique publique et devrait impliquer toutes les parties prenantes ainsi que les organisations intergouvernementales ou internationales concernées. A cet égard on reconnaît que :

a) le pouvoir de décision en ce qui concerne les questions de politique publique liées à l’Internet, est le droit souverain des Etats. Ceux-ci ont des droits et des responsabilités en ce qui concerne les questions de politique publique liées à l’Internet, qui ont une portée internationale ;

b) le secteur privé a eu et devrait continuer à jouer un rôle important dans le développement de l’Internet, dans les domaines tant techniques qu’économiques ;

c) la société civile a également joué un rôle important pour les questions liées à l’Internet, en particulier au niveau communautaire, et devrait continuer de jouer ce rôle ;

d) les organisations intergouvernementales ont eu et devraient continuer d’avoir un rôle de faciliteur dans la coordination des questions de politique publique liées à l’Internet ;

e) les organisations internationales ont eu elles aussi et devraient continuer d’avoir un rôle important dans l’élaboration de normes techniques et de politiques relatives à l’Internet.

50. Les problèmes internationaux liés à la gouvernance de l’Internet devraient être traités de manière coordonnée.Nous demandons au Secrétaire général des Nations Unies de créer un groupe de travail sur la gouvernance de l’Internet, dans le cadre d’un processus ouvert et inclusif prévoyant un mécanisme garantissant la participation pleine et active des représentants des Etats, du secteur privé et de la société civile tant des pays développés que des pays en développement et faisant intervenir les organisations intergouvernementales et internationales ainsi que les forums concernés pour, d’ici à 2005, étudier la gouvernance de l’Internet et éventuellement formuler des propositions concernant les mesures à prendre.

7) Des applications TIC en toutes circonstances

51. L’utilisation et le déploiement des TIC devraient contribuer à faciliter notre vie quotidienne dans tous les domaines. Les TIC peuventêtre très utiles pour de nombreuses applications : administration et services publics, soins de santé et information sanitaire, enseignement et formation, emploi et création d’emplois, affaires, agriculture, transports, protection de l’environnement et gestion des ressources naturelles, prévention des catastrophes naturelles, culture, et aussi pour promouvoir l’éradication de la pauvreté et atteindre d’autres objectifs de développement reconnus. Les TIC devraient également contribuer à instaurer des structures durables de production et de consommation et à atténuer les obstacles traditionnels, donnant ainsi à tous la possibilité d’accéder aux marchés locaux et aux marchés mondiaux de façon plus équitable. Les applications devraient être conviviales, accessibles à tous, abordables, adaptées aux besoins locaux en termes de cultures et de langues, et faciliter le développement durable. A cet égard, il conviendrait que les collectivités locales assument un rôle majeur dans la prestation de services TIC, pour le bien des populations concernées.

8) Diversité et identité culturelles, diversité linguistique et contenu local

52. La diversité culturelle est le patrimoine commun de l’humanité. La société de l’information devrait être fondée sur le respect de l’identité culturelle, de la diversité culturelle et linguistique, des traditions et des religions, devrait promouvoir ce respect et favoriser le dialogue entre les cultures et les civilisations. La promotion, l’affirmation et la préservation des différentes identités culturelles et des différentes langues, objets de documents pertinents approuvés par les Nations Unies et notamment, de la Déclaration universelle de l’UNESCO sur la diversité culturelle, enrichiront davantage la société de l’information.

53. Dans l’édification d’une société de l’information inclusive, il faudra accorder la priorité à la création, à la diffusion et à la préservation de contenus dans différentes langues et différents formats, une attention particulière étant prêtée à la diversité d’origine des oeuvres et à la nécessaire reconnaissance des droits des auteurs et des artistes. Il est essentiel de promouvoir la production/l’accessibilité de tous les contenus, éducatifs, scientifiques, culturels ou récréatifs, dans différentes langues et dans différents formats. L’élaboration de contenus locaux adaptés aux besoins nationaux ou régionaux encouragera le développement socio-économique et stimulera la participation de toutes les parties prenantes, en particulier les habitants des zones rurales, isolées ou marginalisées.

54. La préservation du patrimoine culturel constitue une composante fondamentale de l’identité et de la compréhension de soi qui relie une communauté à son passé. La société de l’information devrait mettre en valeur et préserver le patrimoine culturel pour les générations futures, par toutes les méthodes appropriées, y compris la numérisation.

9) Médias

55. Nous réaffirmons notre adhésion aux principes de la liberté de la presse et de la liberté de l’information, ainsi qu’à ceux de l’indépendance, du pluralisme et de la diversité des médias, qui sont essentiels à la société de l’information. La liberté de chercher, de recevoir, de répondre et d’utiliser des informations pour la création, l’accumulation et la diffusion du savoir est importante pour la société de l’information. Nous prônons une utilisation et un traitement responsables de l’information par les médias conformément aux normes éthiques et professionnelles les plus élevées. Les médias traditionnels, quelle que soit leur forme, jouent un rôle important dans la société de l’information et les TIC devraient y contribuer. Il convient d’encourager la diversité de propriété des médias, conformément à la législation des pays et compte tenu des conventions internationales pertinentes. Nous réaffirmons la nécessité de réduire les disparités entre les médias au plan international en particulier en ce qui concerne l’infrastructure, les ressources techniques et le développement des compétences.

10) Dimensions éthiques de la société de l’information

56. La société de l’information devrait respecter la paix et préserver les valeurs fondamentales que sont la liberté, l’égalité, la solidarité, la tolérance, le partage des responsabilités et le respect de la nature.

57. Nous reconnaissons l’importance de l’éthique pour la société de l’information, qui devrait favoriser la justice ainsi que la dignité et la valeur de l’être humain. La famille devrait bénéficier de la protection la plus large possible pour être en mesure d’assumer son rôle déterminant dans la société.

58. L’utilisation des TIC et la création de contenus devrait respecter les droits de l’homme et les libertés fondamentales d’autrui, notamment la vie privée ainsi que la liberté d’opinion, de conscience et de religion, conformément aux instruments internationaux pertinents.

59. Tous les acteurs de la société de l’information devraient prendre les mesures appropriées, notamment préventives, déterminées par la loi, pour empêcher les utilisations abusives des TIC, par exemple les actes délictueux motivés par le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie, ainsi que par l’intolérance, la haine et la violence, de même que toutes les formes de maltraitance des enfants, en particulier la pédophilie et la pornographie infantile, et le trafic et l’exploitation d’êtres humains.

11) Coopération internationale et régionale

60. Notre but est d’utiliser pleinement les possibilités offertes par les TIC dans les efforts que nous déployons pour parvenir aux objectifs de développement qui ont été décidés à l’échelle internationale, notamment à ceux de la Déclaration du Millénaire, et pour concrétiser les principes fondamentaux exposés dans la présente Déclaration. La société de l’information est par nature universelle, et les efforts des nations doivent être renforcés par la coopération internationale et régionale efficace des Etats, du secteur privé, de la société civile et des autres parties prenantes, notamment des institutions financières internationales.

61. Pour édifier une société de l’information mondiale inclusive, nous rechercherons et appliquerons efficacement des approches et des mécanismes internationaux concrets, notamment en ce qui concerne l’assistance financière et technique. Par conséquent, tout en reconnaissant à sa juste valeur la coopération en cours dans le domaine des TIC, au moyen de divers mécanismes, nous invitons toutes les parties prenantes à adhérer au « Pacte de solidarité numérique » décrit dans le Plan d’action. Nous sommes convaincus que l’objectif arrêté au plan international est de contribuer à réduire la fracture numérique, de promouvoir l’accès aux TIC, de créer des perspectives numériques, et de tirer parti du potentiel qu’offrent les TIC pour le développement. Nous prenons bonne note de la volonté exprimée par certains de créer un « Fonds de solidarité numérique international » alimenté par des contributions volontaires et par d’autres d’entreprendre des études concernant les mécanismes existants, ainsi que l’efficacité et la faisabilité d’un tel fonds.

62. L’intégration régionale contribue au développement de la société mondiale de l’information et rend indispensable une étroite coopération à l’intérieur des régions et entre régions. Le dialogue régional devrait contribuer au renforcement des capacités nationales et à l’harmonisation entre les stratégies nationales et les objectifs de la présente Déclaration de principes dans des conditions de compatibilité, les spécificités nationales et régionales étant respectées. Dans ce contexte, nous nous félicitons des mesures TIC prises dans le cadre de toutes ces initiatives et nous encourageons la communauté internationale à les appuyer.

63. Nous décidons d’aider les pays en développement, les pays les moins avancés et les pays à économie en transition, en utilisant toutes les sources de financement, en leur fournissant une assistance financière et technique et en créant des conditions propices à des transferts de technologie compatibles avec les objectifs de la présente Déclaration et du Plan d’action.

64. Les compétences fondamentales de l’Union internationale des télécommunications (UIT) dans le domaine des TIC – assistance pour réduire la fracture numérique, coopération internationale et régionale, gestion du spectre des fréquences radioélectriques, élaboration de normes et diffusion de l’information – sont déterminantes pour l’édification de la société de l’information.

C Vers une société de l’information pour tous basée sur le savoir partagé


65. Nous nous engageons à renforcer la coopération afin de chercher des réponses communes aux problèmes qui se posent et aux défis associés à la mise en oeuvre du Plan d’action qui donnera corps à la conception d’une société de l’information inclusive reposant sur les principes essentiels énoncés dans la présente Déclaration.

66. Nous nous engageons en outre à évaluer et à suivre les progrès réalisés en vue de réduire la fracture numérique, en tenant compte des différents niveaux de développement, pour atteindre les objectifs de développement approuvés au plan international, en particulier ceux qui sont énoncés dans la Déclaration du Millénaire, et pour évaluer l’efficacité des investissements et de la coopération internationale dans l’édification de la société de l’information.

67. Nous sommes fermement convaincus qu’ensemble, nous entrons dans une nouvelle ère à l’immense potentiel, celle de la société de l’information et de la communication élargie entre les hommes. Dans cette société naissante, l’information et le savoir peuvent être produits, échangés, partagés et communiqués au moyen de tous les réseaux de la planète. Si nous prenons les mesures nécessaires, tous les habitants de la planète pourront bientôt ériger ensemble une nouvelle société de l’information basée sur le savoir partagé et fondée sur une solidarité mondiale et sur une meilleure compréhension mutuelle entre les peuples et les nations. Nous ne doutons pas que ces mesures ouvriront la voie à l’édification d’une véritable société du savoir.

Genève, 12 décembre 2003


Note : Le Sommet mondial sur la société de l’information (SMSI) est un forum mondial organisé par les Nations unies. C’est un sommet tripartite, ouvert aux gouvernants de tous les pays, aux firmes multinationales et à la société civile. Il vise à réduire l’inégalité des habitants de la planète vis-à-vis de l’accès à l’information par le biais des nouvelles technologies de l’information et de la communication, en particulier d’Internet.