La Déclaration définit deux conditions que doivent remplir les publications pour être en libre accès : un droit gratuit, irrévocable d’y accéder, de les copier, utiliser, distribuer et de réaliser des œuvres dérivées ; un dépôt dans une archive ouverte assurant le libre accès, l’interopérabilité et l’archivage à long terme.  

Déclaration de Bethesda pour l’édition en libre accès

Synthèse de la réunion sur la publication en libre accès – 11 avril 2003

Les déclarations de principe qui suivent ont été rédigées au cours de la réunion qui a eu lieu le 11 avril 2003 aux Etats-Unis au siège du Howard Hughes Medical Institute à Chevy Chase dans l’Etat de Maryland.

L’objectif de ce document est d’encourager les débats au sein de la communauté de la recherche biomédicale sur les moyens à employer afin de concrétiser le plus rapidement possible ce souhait largement partagé qu’est le libre accès à la littérature scientifique primaire.  Notre objectif était de nous mettre d’accord sur les mesures concrètes nécessaires à la promotion d’un passage rapide et efficace à la publication en libre accès ; ces mesures pourraient être appliquées par toutes les parties concernées, à savoir, les organismes de soutien et de financement de la recherche scientifique, les chercheurs qui génèrent les résultats, les éditeurs par l’intermédiaire desquels les résultats de la recherche sont évalués par les pairs et distribués, et enfin les chercheurs, bibliothécaires et toute autre personne ayant besoin d’accéder à ce savoir.

La liste des personnes présentes à cette réunion figure à la fin des textes des déclarations de principe ; ces personnes étaient présentes en tant d’individus et ne représentaient pas obligatoirement leurs organismes respectifs. En conséquence, bien que ces déclarations traduisent un consensus de groupe, elles ne sauraient être interprétées comme ayant bénéficié du soutien inconditionnel des individus ou d’un quelconque positionnement de leurs organismes.

Nous avons l’intention de re-convoquer, dans les mois à venir, un groupe élargi afin de rédiger une version définitive des principes. Nous demanderons ensuite aux agences de financement, aux sociétés savantes, aux éditeurs, aux bibliothécaires, aux organismes de recherche ainsi qu’aux chercheurs, de bien vouloir cautionner officiellement ces principes en tant que norme reconnue de publication, évaluée par les pairs, des résultats de travaux de recherche originaux en sciences biomédicales.

Le présent document comporte quatre parties : une définition provisoire de la publication en libre accès suivie des rapports des trois groupes de travail.

Définition de la publication en libre accès

Une publication en libre accès [1]Le libre accès est l’attribut de travaux individuels et pas nécessairement celui des revues ou des éditeurs. est une publication qui remplit les deux conditions suivantes :

  1. Le/les auteur(s) ainsi que les titulaires du droit d’auteur accordent à tous les utilisateurs un droit d’accès gratuit, irrévocable, mondial et perpétuel et leur concèdent une licence leur permettant de copier, utiliser, distribuer, transmettre et visualiser publiquement l’œuvre et d’utiliser cette œuvre pour la réalisation et la distribution d’œuvres dérivées, sous quelque format électronique que ce soit et dans un but raisonnable, et ce à condition d’en indiquer correctement l’auteur [2]Les règles de la communauté, plutôt que les lois sur le droit d’auteur, continueront à fournir les mécanismes garantissant une bonne attribution de la paternité de l’œuvre et une utilisation responsable de l’œuvre publiée, comme elles le font déjà aujourd’hui. ; ils accordent également aux utilisateurs le droit de faire un petit nombre de copies papier pour leur usage personnel.
  2. La version complète de l’œuvre, ainsi que tout document connexe, dont une copie de l’autorisation ci-dessus, réalisée dans un format électronique standard approprié, est déposée dès sa publication initiale dans au moins un réservoir en ligne subventionné par un établissement d’enseignement supérieur, une société savante, une agence gouvernementale ou tout autre organisme reconnu œuvrant pour le libre accès, la diffusion sans restriction, l’interopérabilité, et l’archivage à long terme (PubMed Central est un exemple de ce type de réservoir en sciences biomédicales).

 

Déclaration du groupe de travail Institutions et Agences de financement

Nos organismes soutiennent et favorisent le développement de la recherche scientifique afin d’encourager la découverte de nouvelles idées et de nouveaux savoirs dans l’intérêt public.  Nous reconnaissons que la publication des résultats est une composante vitale de la recherche scientifique et que les coûts de publication font partie des coûts de la recherche.  Nous attendons des membres de nos corps enseignants et bénéficiaires de nos subventions qu’ils partagent leurs idées et leurs découvertes par le biais des publications.  Cependant, cette mission ne pourra être pleinement accomplie tant que les travaux de la recherche ne seront pas diffusés aussi largement que possible dans la société.  L’Internet a changé de fond en comble les conditions pratiques et économiques de la diffusion des résultats publiés de la recherche et a grandement élargi les possibilités d’accès.

Afin d’exploiter les atouts de ces évolutions, il va falloir faire évoluer en profondeur nos politiques en ce qui concerne les publications de nos enseignants-chercheurs bénéficiaires de subventions.

  1. Nous encourageons donc nos enseignants-chercheurs bénéficiaires de subvention à publier leurs travaux selon les principes du libre accès afin d’en optimiser l’accès au profit des scientifiques, des chercheurs et du public dans le monde entier.
  2. Nous sommes conscients que le passage à un accès libre et gratuit, tout en permettant probablement de réduire la globalité des coûts, risque de déplacer les coûts vers le chercheur qui devra payer à la page, ou vers les éditeurs qui verront leur chiffre d’affaire diminuer. Nous nous engageons à participer au remboursement de ces coûts. C’est pourquoi nous sommes d’accord pour aider au financement des dépenses nécessaires à la publication, selon le modèle du libre accès, d’articles dans des revues avec comité de lecture (sous réserve de rester dans des limites raisonnables déterminées par les conditions du marché et les services fournis).
  3. Nous réaffirmons le principe selon lequel seule la valeur intrinsèque des travaux et non la revue dans laquelle ces travaux sont publiés sera pris en compte dans les nominations, les promotions, les primes ou l’attribution des subventions.
  4. Nous considérerons la présence d’une publication en libre accès comme une preuve de service rendu à la communauté lorsque nous évaluerons les candidatures aux postes d’enseignant-chercheur, les dossiers de promotion et les demandes de subventions.

 

Nous adoptons ces politiques dans l’espoir que les éditeurs de travaux scientifiques partagent notre souhait d’optimiser les retombées publiques de la recherche scientifique et prennent ces nouvelles politiques pour ce qu’elles sont, à savoir une occasion de travailler ensemble pour le plus grand bien de la communauté scientifique et du public.

 

Déclaration du groupe de travail Bibliothèques et Editeurs

Nous pensons que le libre accès deviendra un élément incontournable de l’édition scientifique de demain et que l’accès aux travaux présentant les résultats de la recherche scientifique actuelle devra être aussi ouvert et libre que possible. Les bibliothèques et les éditeurs devront faire tout leur possible pour que cette transition se fasse rapidement sans pour cela perturber la dissémination harmonieuse de l’information scientifique.

Les bibliothèques proposent de :

  1. Développer et maintenir les mécanismes nécessaires à ce passage à l’édition en libre accès et de mettre des exemples de ces mécanismes à la disposition de la communauté.
  2. Donner une place prioritaire à la sensibilisation de nos utilisateurs quant aux avantages de l’édition et des revues en libre accès dans nos programmes de formation et nos activités extérieures.
  3. Signaler et souligner les revues en libre accès dans nos catalogues et autres bases de données pertinentes.

 

Les éditeurs de revues proposent de :

  1. S’engager à fournir une option en libre accès pour tout article scientifique publié dans les revues qu’ils éditent.
  2. Fixer un calendrier spécifique pour le passage des revues aux modèles en libre accès.
  3. Collaborer avec d’autres éditeurs d’œuvres en libre accès et toutes autres parties concernées afin de développer des outils destinés aux auteurs et aux éditeurs ; ces outils devraient permettre de publier les manuscrits dans des formats électroniques normalisés adaptés à l’archivage et l’interrogation.
  4. S’assurer que, pour les modèles de libre accès faisant payer les auteurs, les chercheurs pouvant prouver qu’ils n’en ont pas les moyens, en particulier les chercheurs des pays en développement, bénéficient de tarifs préférentiels.

 

 

Déclaration du groupe de travail Chercheurs et Sociétés Savantes

Les cheminements de la recherche scientifique sont inter-dépendants en ce sens que chaque expérience se nourrit des résultats d’autres expériences. Les scientifiques qui effectuent les recherches ainsi que les associations professionnelles qui les représentent, ont grand intérêt à faire en sorte que les résultats des recherches soient disséminés de la manière la plus rapide, la plus large et la plus efficace possible. La possibilité, voire l’obligation, de partager librement les résultats de la recherche, les idées et les découvertes avec la communauté scientifique et le public découle de la publication électronique des résultats de la recherche.

 

En conséquence :

 

  1. Nous cautionnons les principes du modèle du libre accès.
  2. Nous reconnaissons que la publication est un élément essentiel du processus de recherche et que les coûts de publication entrent dans les coûts de base de la recherche.
  3. L’ensemble des sociétés savantes affirment leur profond soutien au modèle du libre accès ainsi que leur engagement à faire en sorte que le libre accès s’applique à terme à tous les travaux qu’elles publient. Elles partageront les informations concernant les actions qu’elles entreprennent pour aboutir au libre accès avec les communautés qu’elles desservent et avec toute autre entité qui pourrait bénéficier de leur expérience.
  4. Les chercheurs sont d’accord pour manifester leur soutien au libre accès en choisissant en priorité de publier dans les revues en libre accès et dans celles qui se tournent effectivement vers le libre accès, et de faire partie du comité de relecture ou de rédaction de ces mêmes revues.
  5. Les chercheurs sont d’accord pour se faire les avocats d’un changement dans les méthodes d’évaluation des promotions et des titularisations afin que les services rendus à la communauté par les publications en libre accès soient pris en compte et que le critère selon lequel un article est jugé soit sa valeur intrinsèque plutôt que le titre de la revue qui le publie.
  6. Les chercheurs et les sociétés savantes sont d’accord pour dire qu’un travail d’éducation est indispensable pour faire aboutir le libre accès ; ils s’engagent donc à éduquer leurs collègues, leurs membres et le public quant à l’importance du libre accès et à leur expliquer les raisons de leur soutien.

LISTE DES PARTICIPANTS

Patrick O. Brown
Howard Hughes Medical Institute
Faculté de médecine de l’université Stanford et
Public Library of Science
Etats-Unis

Diane Cabell
Directeur adjoint
Centre Berkman pour l’Internet et la Société de la faculté de droit de Harvard
Etats-Unis

Aravinda Chakravarti
Directeur,
Institut de Médecine génétique McKusick-Nathans de l’université Johns Hopkins, et
Rédacteur en chef de Genome Research
Etats-Unis

Barbara Cohen
Directeur Général
Journal of Clinical Investigation
Etats-Unis

Tony Delamothe
BMJ Publishing Group
Royaume-Uni

Michael Eisen
Lawrence Berkeley National Laboratory
Université de Californie à Berkeley, et
Public Library of Science
Etats-Unis

Les Grivell
Responsable des Programmes
European Molecular Biology Organization
Allemagne

Professeur Jean-Claude Guédon
Professeur de Littérature Comparée, Université de Montréal, et
Membre de la sous-direction de l’information, Open Society Institute
Canada

R. Scott Hawley
Genetics Society of America
Etats-Unis

Richard K. Johnson
Enterprise Director
SPARC (Scholarly Publishing and Academic Resources Coalition)
Etats-Unis

Marc W. Kirschner
Faculté de médecine de Harvard
Etats-Unis

David Lipman
Directeur, NCBI
National Library of Medicine
National Institutes of Health
Etats-Unis

Arnold P. Lutzker
Lutzker & Lutzker, LLP
Conseiller juridique de l’Open Society Institute
Etats-Unis

Elizabeth Marincola
Directeur Général
The American Society for Cell Biology
Etats-Unis

Richard J. Roberts
New England Biolabs
Etats-Unis

Gerald M. Rubin
Vice-Président et Directeur, Campus de recherche Janelia Farm
Howard Hughes Medical Institute
Etats-Unis

Professeur Robert Schloegl
Président, Task Force on Electronic Publishing
Max-Planck-Gesellschaft
Allemagne

Vivian Siegel
Directeur Général
Public Library of Science
Etats-Unis

Anthony D. So
Health Equity Division
The Rockefeller Foundation
Etats-Unis

Peter Suber
Professeur de Philosophie, Earlham College
Open Access Project Director, Public Knowledge
Directeur de recherche, SPARC
Etats-Unis

Harold E. Varmus
Président, Memorial Sloan-Kettering Cancer Center
Président, Conseil d’Administration, Public Library of Science
Etats-Unis

Mr. Jan Velterop
Editeur
BioMed Central
Royaume-Uni

Mark J. Walport
Directeur Désigné
The Wellcome Trust
Royaume-Uni

Linda Watson
Directeur
Bibliothèque des Sciences de la Santé Claude Moore
Système de Santé de l’Université de Virginie
Etats-Unis

References[+]